Durant la première année de la guerre, une faction était restée notablement silencieuse - la Fraternité Ecarlate. Pendant que d'autres se battaient à grands coups d'armées, la Fraternité infiltrait insidieusement toute les cours des rois. En guise d'armées, le Père de l'Obédience envoyait des agents. Bien que la Fraternité semblât un simple observateur, rien n'était plus loin de la vérité.
La première phase du plan de la Fraternité Ecarlate était simple - attendre et voir. Le Père de l'Obédience passa les premiers mois de la guerre à déterminer qui attaquerait qui et où les véritables centres d'intérêt se situaient. Tant que la guerre se limitait au nord, le Père de l'Obédience se contenta des rapports que ses agents lui envoyaient de chaque camp. Ces hommes, se faisant passer pour des érudits ou des sages depuis bien avant le début des hostilités, conseillaient seigneurs et commandants, imprimant ainsi la marque invisible de la Fraternité dans toutes les batailles. Ces espions travaillaient pour s'assurer que les hostilités continueraient et que personne ne gagnerait. Le Père de l'Obédience voulait que la guerre continue et c'est ce qui se passa.
Un autre groupe d'agents de la Fraternité travaillait plus loin dans des contrées plus isolées et désolées. Là-bas, ils rencontrèrent d'inquiétantes créatures et leur murmurèrent de se soulever et de conquérir la terre des humains. Des montagnes de Cristal jusqu'aux bourbières des Trolls, elles répondirent. Ainsi, à la manière de la lune, silencieusement et inexorablement, le Père de l'Obédience levait une marée maléfique.
Quand le Grand Royaume se réveilla, la Fraternité passa à la deuxième phase de son plan : faire pencher la balance en sa faveur. Son dirigeant considérait l'alliance avec certains pays comme vitale. Avant tout, il y avait la Ligue de Fer qu'il ne voulait voir ni prospérer ni mourir. Tant que ces états restaient comme ils étaient, ils constituaient un tampon idéal entre la Fraternité et le Grand Royaume. Bien qu'il égale Ivid dans le mal, le Père de l'Obédience n'appréciait pas du tout le Grand Roi.
Grâce à sa position ambivalente dans les plans de la Fratrernité, la Ligue de Fer reçut des aides et des obstacles étranges durant la guerre. Ainsi, Citadelle, menacée par les armées de la Province du Sud, reçut des équipements, de l'argent, des conseillers et des mercenaires, tous évidement de sources diverses. En vérité, la Fraternité contrôlait tout dans la cité et, ne se doutant visiblement pas de leur véritable provenance, Cobb Darg, le Seigneur Bailli de Citadelle, en faisait bon usage. Le Bailli, un homme capable et énergique, possédant un sens inné de la tactique, utilisa ces ressources pour battre à plate coutur eet à plusieurs reprises l’Armée du Sud bien que sa propre armée fût largement dépassée par le nombre. Cobb Darg, aidé de ses conseillers, fit une utilisation judicieuse de pièges, de fortifications et de magie et mena plus d'une des armées d'Ahlissa à leur perte.
Pendant qu'elle défendait Citadelle et donc Onouailles, la Fraternité travaillait ailleurs pour détruire l'unité de la Ligue de Fer. Sachant que le Grand Marécage bloquerait toute attaque terrestre, le Père de l'Obédience ne leva pas le petit doigt quand Osson libéra la Solandie. Sous la direction d'Ivid, les cours du Grand Royaume étaient peu sensibles aux conseillers de la Fraternité, mais libérées du joug d’Ivid, elles les accueilleraient certainement avec joie - du moins pendant quelque temps.
Une autre partie de la Ligue de Fer avait un intérêt tout particulier pour la Fraternité - la Seigneurie des Iles. Les plans du Père de l'Obédience nécessitait qu'il contrôle les mers du sud, il était donc vital de capturer une flotte. Ainsi, les agents de la Fratrie corrompirent un cousin lointain du prince régnant et se débrouillèrent pour déposer le Prince Latmac Ranold. Une fois que leur marionnette, le Prince Frolmar Ingerskatti, était au pouvoir, la Fraternité conclut un pacte avec lui et pris le contrôle de la Seigneurie. Sur ordre du Père de l’Obédience, Ingerskatti plaça des agents de la Fraternité à des points vitaux du pays. Rapidement, les prêtres du Signe Ecarlate établirent des temples et prêchèrent aux mécontents. La noblesse fut abolie par de nouvelles lois. En bref, la Fratrie Ecarlate modela rapidement ces terres à son image.
La Ligue de Fer sous son contrôle et le Grand Royaume sur le point de s'écrouler43, le Père de l'Obédience passa alors à la troisième phase de son plan. Un ambassadeur encapuchonné de rouge arriva à la cour des Princes des Mers avec un ultimatum : « Soumettez-vous à la Fraternité Ecarlate ou soyez détruits. » Quand les seigneurs de ces terres se moquèrent de lui, il leur présenta une liste de 30 noms de nobles. Avant le lendemain, 27 de ceux-ci étaient morts. Seulement trois avaient survécu aux assassins écarlates dont deux étaient grièvement blessés. Les princes cessèrent vite de rire et se rendirent rapidement en signant un traité avec la Fraternité. Le lendemain, des vaisseaux battant pavillon du Signe Ecarlate accostaient à Monmurg et Port-Toli, débarquant d'étranges guerriers venus des jungles du sud.
Sa flotte agrandie et forte de ses nouvelles troupes venues des jungles fumantes, la Fraternité frappa vite et fort. Aïdye et Onouailles tombèrent d'un coup, défaits par des traitrises internes et les envahisseurs venus de la mer. Citadelle se montra beaucoup plus tenace. Malgré les apparences, Cobb Darg connaissait l'origine exacte de l'aide qu'il avait reçu et avait utilisé cette connaissance à son avantage. Juste avant que les armées de la Fraternité n'arrivent, Darg expulsa ou exécuta tous les agents qu'il put trouver. Quand les armées arrivèrent, il les reçut à sa façon, avec énergie et talent. Ainsi, Citadelle résista à l'assaut et demeura le seul bastion de liberté dans la Ligue de Fer.
A l'ouest, la Fraternité fit le blocus de Gradsul car la flotte de la Kéolande empêchait tout débarquement. Pendant ce temps, les armées de sauvages s'infiltraient dans le Marais Houleux et dans la forêt Noire. Là, une grande coalition d'elfes de la Kéolande leur opposa une redoutable résistance et les força à stopper leur marche. Bien que les défenseurs résistent, des renforts incessants arrivaient des jungles et maintenaient une stricte pression sur la Kéolande.
Contrairement à toutes les autres nations impliquées dans la guerre, la Fraternité Ecarlate ne tenta pas de gagner plus qu'elle n'avait déjà acquis. Voyant le long terme, le Père de l'Obédience cessa rapidement toute hostilité ouverte préférant se concentrer sur l'administration de ses nouveaux territoires. Des agents de la Fraternité remplacèrent les officiels aux postes clés, des prêtres ouvrirent des temples et des lois établissant le pouvoir absolu de la Fraternité furent lentement mises en vigueur.
Pendant de longues années (582-584 AC), les nations de la Flanaesse avaient comploté, tué, massacré jusqu'à ce que toutes soient à genoux. La guerre avait épuisé la terre et les hommes. La Furyondie et Iuz étaient arrivés à une impasse ; les ressources du Nyrond étaient épuisées et ses paysans croulaient sous les taxes, faisant monter un vent de révolte ; le Grand Royaume s'était effondré et ses anciens nobles en venaient à se battre les uns avec les autres ; la Kéolande combattait des invasions de toutes parts ; nombre d'humains, de nains, d'elfes, et d'orcs étaient partis pour ne jamais revenir ; les fermes étaient vides ; les champs dévastés ... La guerre devait cesser.
Finalement, la trêve proposée par la Fraternité fut acceptée de tous après d'âpres négociations, des intimidations de toutes sortes, et même quelques assassinats45. La Cité de Faucongris, qui fut épargnée par la guerre, devint le site de la conférence46. C'est en Vendangier, que le Grand Conseil (comme il fût appelé) se réunit.
La paix, bien que simple en théorie, s'avéra être un véritable casse-tête pour les nombreux ambassadeurs présents à Faucongris. Durant les six mois que dura le Grand Conseil, les intrigues de tout style abondèrent car chacun essayait d'obtenir des concessions plus favorables. La conférence fut presque annulée à de nombreuses fois à cause des ombrages subits par certains, réels ou imaginaires.
Finalement, le Jour de la Grande Signature arriva et presque toutes les nations étaient tombées d'accord. C'est alors que cet évènement important allait avoir lieu que l'irréparable se produisit.
Même actuellement, on ne sait pas exactement ce qui s’est passé mais quelqu'un tenta apparemment de tuer toute les délégations présentes à la cérémonie. Une immense explosion détruisit une bonne partie du Grand Hall de Faucongris quelques instants seulement avant que les invités n'arrivent dans les lieux. Il s'ensuivit une terrible bataille magique au travers de la Vieille Ville. Quand tout redevint calme, les gardes découvrirent les corps calcinés de deux puissants membres du mystérieux Cercle des Huit - Otiluke et Tenser. Le meurtrier de ceux-ci s'avéra être Rary, lui aussi membre du Cercle. Toutefois, celui-ci semblait avoir prémédité son coup car tous les clones existants des deux mages furent également détruits rendant leur mort irrémédiable.
Les motivations de Rary sont incertaines. D'après ceux qui le connaissait bien, il aurait voulu profiter de cette occasion - la signature de la paix - pour prendre le pouvoir dans le chaos qui aurait suivi la mort de tant de dirigeants de tant de divers pays. D'autres prétendent que Rary était un agent de la Fraternité Ecarlate.
Démasqués, Rary et son complice, Sire Robilar, fuirent la cité et trouvèrent refuge dans les profondeurs du Désert étincelant. Là-bas, ils asservirent les nomades et établirent leur royaume. Bien que petit et mystérieux, ce nouvel état pourrait bien un jour menacer la cité de Faucongris. Malgré cet évènement, la paix fut signée rapidement entre les diverses parties. Ainsi naquit le Pacte de Faucongris qui mettait fin à trois années de guerres que l'on nomme encore à tort les Guerres de Greyhawk.
43 G. Ivril attribue avec certitude la chute du Grand Royaume à la Fraternité Ecarlate. Toutefois, la plupart des historiens considèrent que la seule folie d'Ivid était une raison largement suffisante pour ça.
44 On ne sait pas pourquoi la Fratrie demanda la Paix Universelle, probablement pour lui laisser le temps de raffermir son emprise sur ses nouveaux territoires et d'infiltrer d'autres gouvernements.
45 Par exemple, la Francheterre ne signa qu'après que sa frontière avec les Princes des Mers soit clairement définie. Le fief de Roquepoigne ne signa qu'après la mort mystérieuse de quelques atamans.
46 En fait, Faucongris prospéra immensément pendant la guerre. Nombre de réfugiés y arrivèrent fuyant leurs terres dévastées - avec parmi eux les meilleurs érudits, artistes et magiciens de la Flanaesse. Ayant fui avec leurs seules richesses, cet afflux de personnes eut donc pour effet de faire déborder les coffres et les frontières de la cité. Ainsi, à la fin de la guerre, son influence s'étendait sur tout le nord de la Côte Sauvage et la totalité des collines des Cairns.
Références
Histoire officielle des Guerres de Greyhawk
Traduction du "Wars Adventurer's Book" écrit par David Cook.
Traduction initiale par Laurent Debelle.
Relecture par le Chevalier de Greyhawk
Le
prochain article concerne la chronologie des prémices des Guerres de Greyhawk et les évènements survenus entre 578 et 582 AC.
Bonne lecture.
Le Chevalier de Greyhawk
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Merci pour vos commentaires.